Aéroport d’Alger : Lundi 02 décembre, 9h30, un temps couvert et lourd avec un mercure autour de 10° C.

 Une suite interminable de cerveaux gluants et vaporeux de tant de cogitations à la seconde faisait la chaine, leur dernière chaine enfin dans nos frontières. Ils ne trouvent pas ici l’atmosphère qui leur sied.

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Un équilibre recherché entre ces deux organes

 Ils vont à contrecœur, tenter l’aventure outre-mer. En attendant de passer les formalités de douanes, ils sympathisent entre eux. Il y a des synapses qui se forment à chaque seconde.

 Mais comme les cerveaux se côtoient de très prés, il y a un miracle qui se produit devant nous, pauvres écervelés : des ponts sont crées entre ces remarquables cervelles. Ça commence par des éclairs d’électricité intelligente, ensuite de véritables passerelles voient le jour entre chaque bulbe.

Des synapses inter cerveaux sont crées. Tout l’aéroport est le témoin privilégié du pas historique que vient de faire l’évolution de l’humanité.

Les deux lobes de chaque bulbe se mettent à vibrer comme pour applaudir et exprimer leur joie d’avoir trouvé un autre génie, un frère de circonvolutions, un frère de connexion.

Les connexions inter cerveaux se multiplient de proche en proche pour toucher ces candidats à l’émigration. Dans la salle d’enregistrement, la tension est à son comble :

Les douaniers ne trouvent rien à chercher, personne ne déclare rien à personne, ils sont hypnotisés par le phénomène qui se passe dans la salle de contrôle.
Soudain, plus de courant. Les terminaux, les néons sont aveugles. Les portes coulissantes bloquées, les portables muets et chose encore plus curieuse, toutes les personnes présentes dans l’aéroport sont figées. Elles sont conscientes mais paralysées.
Profitant de cette extraordinaire situation, le chapelet de cerveaux changea brusquement ses intentions migratoires et quitta l’aéroport pour une destination Inconnue.

Une histoire à dormir debout, à ne pas croire, à oublier mais qui s’est effectivement passée. Une rencontre unique, l’accélération de l’histoire au présent et en direct.


Une fois nos bulbes des hautes sphères engloutis par la ville, l’aéroport et ses occupants reprennent leurs activités le plus normalement du monde. Une amnésie collective est passée par là.

Nos honorables bulbes ont crée leur association. Sans autorisation ni papiers officiels, ces belles créations savent maintenant. Nos cerveaux sont au courant, le courant passe entre eux, pour eux et on l’espère pour nous, éternels assistés. La télépathie est leur moyen de communication. Ils sont coincés entre rester connectés en bulbes ou bien se déconnecter physiquement mais rester télépathiquement en contact.

 Ce genre de relation a pour avantage la discrétion. Ils peuvent décider d’une conférence et la faire uniquement par télépathie. Je vous disais qu’ils savaient maintenant. Déjà que le cerveau humain n’a pas encore été égalé et encore moins dépassé par la machine. Imaginez une masse de top cerveaux reliés télépathiquement.

 Ça ne va pas égaler Dieu rassurez-vous !


Nous sommes connectés par la tête. Il nous manque une dimension que la tête ne peut donner. C’est l’union des cœurs qui cloche, qui manque. Combien l’homme est compliqué. Il est tiraillé par plusieurs côtés, plusieurs tendances, plusieurs besoins.

 L’homme est téléguidé par ses instincts, ses envies. Tout ce qu’il fait est dicté par ses passions, ses rêves. Un moi nu et fragile est né.

 Il est pur et voit tout en rose. Ses yeux ne voient que du beau, ses pensées naïves dans un monde merveilleux où il commence petit à petit à former une carapace, pour se défendre contre les adultes et leur monde froid et sans rêves.


Nos honorables bulbes cogitent mais manquent de cœur, ils sont connectés télépathiquement, mais les cœurs non. C’est un tout l’homme, plein de tendances, d’attraits contradictoires, de liens, de jeux…
Comment allier la tête et le cœur ? L’esprit et l’âme ? 
Nos bulbes télépathiques sont-ils sympathiques ? n’ont-ils pas des tics pathétiques ?

Une machine ne lésine pas : elle exécute. Un cœur ne calcule pas : il aime.


Nos bulbes déambulant le long du boulevard de l’abîme, cherchant un bout de cœur à se mettre sous le toit de leur cerveau brillant et… froid.

Ils savent mais ne ressentent point.


De brillants cerveaux connectés entre eux, cela donne à… avoir peur de ce qui pourrait sortir de ces multiples circonvolutions.

 Mais de grands cœurs connectés entre eux, cela donne quoi ? Une assemblée planétaire qui ne va plus se planter devant des sans-abris, des orphelins, des oubliés de la société.

 L’union des cœurs est en théorie, plus facile à créer mais là, maintenant, tout de suite, c’est le rythme de la vie, la pompe de l’oxygène qui gonfle la vague de la grande bleue comme le bleu soldat naïf qui doit tuer ou se faire tuer. Le cœur et l’esprit, le chaud et le glacé, l’agacé et l’insipide, le placide et l’acide, l’ami et l’autre, le cloitré et défenestré.


« Le cœur a ses raisons que la raison ignore » mais la tête a sa logique que le cœur n’aime pas.

C’est l’éternel duel cœur raison. Mais peut-on concevoir un équilibre cœur-raison ? passion-logique ? Cœur dans la main et tête bien plantée… entre les épaules ?


Mais cette union naturelle cœur esprit est supervisée par une dimension qui dépasse l’entendement humain : c’est le divin qui équilibre cette perfection qui est l’être humain.
Comment nos bulbes ambulants s’interconnectent côté cœur ?

Le cœur sent et ressent. Il est intuitif et large de… cœur.
Un bulbe parmi la grappe possède une protubérance cardiaque plus importante que celle des autres bulbes noyés dans l’anonymat de la grappe. Un bulbe pas comme les autres, ayant une pulsion cardiaque différente de ses confrères de cogitations. Il n’ose pas montrer sa différence par peur du rejet. Le rejet de ses radiations cardiaques sur le groupe de bulbes logiques et froids. Une contamination sentimentale est toujours à craindre. Les cerveaux craignent pour leur structure mathématique juste. Un cœur gros peut influer sur leur logique glaciale. Un cœur est chaud, il y a donc risque de propagation calorifique sur la logique arctique et fonte irréversible de la raison enfin résignée.
Notre bulbe différent, appelons le « Garnouna » avait de plus en plus d’états d’âme.


Notre « Garnouna » ne savait plus où donner de… la raison à son cœur débordant de dons, d’amour. Il avait de plus en plus de mal à cacher son déséquilibre logique au détriment de la tendresse, sa cassure entre ses frères purement « circonvolutionistes » et son âme transparente et généreuse. Les froids calculs des circonvolutions bulbiques lui donne froid au… dos du cœur. 
Un jour, un froid bulbe s’aperçu de « l’anormalité » de Garnouna comparée à l’égalité de pensée des autres cervelets de frères. Et c’est à ce moment que tout a commencé…


Oui, tout a commencé à aller mal pour la sécurité de Garnouna, notre cœur d’artichaut bien chaleureux dans son cœur débordant. 
Le premier bulbe circonvolutioniste à soupçonner Garnouna de cœur épanché était un certain Elfhama. 
– Ou es-tu Garnouna? J’ai l’impression que tu divagues et que tu fais des vagues avec des rêves à la con. Reviens vers nous cher Garnouna ou alors ?
– N’ai-je pas le droit de rêvasser ? 
– Il faut rêver logiquement
– Les rêves n’ont rien de logique !
– Justement, tu t’éloignes de notre chère logique, repris Elfhama
– Je suis toujours logique, mais je réfléchis avec mon cœur
– Tiens tiens, c’est possible ?
– Sûr, mon cœur est comme un bâton d’aveugle, il me guide quand la logique est impuissante ou méchante.
– Ton cas est désespéré Garnouna, je dois avertir le Haut Conseil Synaptique
vraiment?
notre Garnouna était désemparé. La situation commençait à sentir le roussi.
Elfhama semblait décidé et voulait sans plus tarder signaler cette difformité cérébrale
dont « souffrait » Garnouna: un cœur, une canne pour aveugle, du charabia tout ça, preuve que Garnouna avait besoin d’un réajustement de ses circonvolutions. Et Elfhama ne voyait que le H C S (Haut Conseil Synaptique), seule assistance pour Garnouna afin de le remettre sur les rails de la logique mathématique du commun des bulbes bien raisonnants. 
 » je me suis trop découvert » pensa Garnouna. Je n’aurai pas dû me confier à Elfhama. mais à qui aurai-je du ouvrir les vannes de mon cœur décodeur naif et ouvert comme une page vierge.
 » comment trouver un confident qui comprenne ce dilemme. Concilier l’esprit et le cœur, marier l’âme chaleureuse et la logique glaciale de la tête. 
– tu dois me suivre, Garnouna, je vais te conduire à notre Conseil pour t’aider à raisonner plus clair en ta tête stressée.
-ma tête est bien pensante, répondit Garnouna, c’est le myocarde qui déborde de son cadre, c’est cette pompe à sentiments qui envoie du jus bienheureux à la tête qui tient les commandes.
– tu ne fais que me convaincre un peu plus de ton état mental pathétique.

Un bâtiment tout sombre, une bâtisse grise et triste, un bâtiment qui ment, un immeuble qui meuble les heures de torture en voiture ou en direct, électrique ou à mains nues.
Garnouna semble entouré d’une Chappe de plomb représentée par son « diable-gardien ».

L’effet était à son comble à la vue de ce sinistre bâtiment qui ment, qui respire la froideur sibérienne. 
-« Moi, Garnouna, tout tendre et naïf, je suis mené vers mes raisonnements à la Fhama. Que vont-ils encore me seriner? que le coeur n’est qu’une pompe à sang? qu’il sert uniquement à distribuer de l’oxygène sans gène à un circuit fermé qu’est notre corps? Pourquoi fermer ses limites? Pourquoi limiter sa voix et… sa voie?


-Levez-vous pour saluer les membres du Haut Conseil Synaptique, ordonna le préposé aux comptes.
Une grande salle supportant plus 5000 sujets bien disciplinés et studieux, habillés de façon uniforme et triste à mourir. Un copié-collé du cerveau calculateur et froid à la puissance 5000. Toute cette masse se leva de façon informatique et sans tic aucun.
– » Gloire à notre HCS » hurlèrent 5000 gorges sans aucune fausse note.
– Garnouna, vous êtes accusé de lèse-cerveau piégé et de perce-coeur assiégé.

Un Silence pesant planait sur l’assemblée, les bulbes, brillants et disciplinés grognèrent de satisfaction.

Notre garnouna n’avait aucun défenseur attitré. Il devait se débrouiller tout seul pour assurer sa défense.